samedi 11 mai 2019

« Un sportif qui meurt subitement est un cardiaque qui s’ignorait »

Docteur Mbaye PAYE
Crédit photo: Leral.net

La mort subite est devenue un phénomène très répandu.  Définie comme un décès  naturel survenant de façon inattendue, elle est parfois le premier symptôme d’une maladie sous-jacente. Dans cet entretien, le docteur Mbaye Paye, cardiologue et médecin du sport, revient en grande partie sur les principales causes et les mesures à prendre pour éviter cet  arrêt cardiaque brutal.

On constate, ces derniers temps, qu’il y a de plus en plus de cas de mort subite. Qu’est-ce qui est à l’origine de ce fait ?

Il faut d’abord savoir que la mort subite peut survenir au repos ou au cours d’une activité physique. Parfois, elle est précédée de symptômes, moins d’une heure avant l’arrêt du cœur. En général c’est des palpitations, un essoufflement, une douleur thoracique, des vertiges voire une syncope ou une lipothymie. C’est dû à un trouble du rythme ventriculaire rapide et inefficace, qui entraine une baisse du rythme cardiaque. Dés fois, le sujet est un sportif en bonne santé et qui, lors de son activité, révèle une pathologie qui était inconnue.

Vous avez évoqué le cas des sportifs professionnels qui sont très souvent victimes. Pourquoi sont-ils si exposés ?

Quand on fait du sport, tous les organes sont sollicités, le cœur en priorité. Voilà pourquoi un sport pratiqué de manière intense peut avoir des effets secondaires pouvant conduire à la mort subite. 90% des cas de mort subite chez les sportifs sont liés à des anomalies cardiaques. On dit souvent qu’un sportif qui meurt sur le terrain est un cardiaque qui s’ignorait. Quand le sportif a moins de 35 ans, la principale cause cardiovasculaire est parfois liée à une maladie génétique appelée cardiomyopathie hypertrophique [augmentation globale du poids du muscle cardiaque NDLR] ou à une dysplasie arythmogène du ventricule droit qui est une substitution du tissu musculaire par un tissu fibreux qui entraîne des épisodes d’arythmie. Quand la victime a plus de 35 ans, la mort subite est le plus souvent liée à un infarctus du myocarde, c’est-à-dire un dysfonctionnement dans la circulation du sang dans l’artère coronaire, bouchée parfois par une plaque de graisse qui laisse sur les lieux un caillot de sang. Mais il ne faut pas aussi oublier le dopage qui cause un réel problème.

Quelles sont les précautions à prendre pour éviter une mort subite ?

Pour les sédentaires, il y a la prévention secondaire et celle primaire. La première, c’est quand l’accident est déjà installé. A ce sujet-là, on lui place un défibrillateur automatique implantable qui est un appareil captant les arythmies et stimulant le cœur. En plus de cela, il lui sera prescrit des médicaments pour réguler le taux de cholestérol et éviter les caillots de sang. La seconde, en l’occurrence la prévention primaire, est plus importante. Elle intervient quand il n’y a pas encore d’accident. Il ne faut pas attendre d’avoir des signes. A un certain âge, il faut commencer à contrôler sa tension artérielle et son taux de sucre, contrôler son poids pour éviter l’obésité ; et surtout éviter le tabac, l’alcool, la sédentarité et le stress. Mais également, il faudra avoir une alimentation saine, éviter le sel et manger cinq fruits et légumes par jour. Pour les sportifs, au-delà de ce que je viens de dire, chacun doit passer une visite médicale complète avant de pratiquer son sport. Après l’interrogatoire d’examen clinique, les sportifs sont soumis à un électrocardiogramme de repos qui vous donne un tracé du rythme cardiaque que le médecin va interpréter. Si l’examen ne révèle rien de particulier, il vous délivre un certificat attestant de l’absence de contre-indication à la pratique sportive. Ce qui doit se faire chaque année.

Est-ce qu’il n’y a pas des professionnels qui passent entre les mailles du filet ?

 Bien sûr qu’il y en a. Il y a des sportifs qui ne font jamais de visite médicale. Ça on le sait tous. Et c’est de la responsabilité des fédérations. On ne doit pas avoir une licence dans une fédération respectable sans faire une visite médicale. Il existe dix règles, appelées les règles d’or, que nous soumettons aux sportifs et qu’ils doivent soigneusement respecter.

Quelles sont ces règles ?

Si le sportif, au cours de son activité physique, a des palpitations, des douleurs thoraciques, un essoufflement, des vertiges, un malaise, une syncope ou une lipothymie il doit arrêter et aller voir un médecin. Il faut qu’il fasse une visite médicale de manière régulière surtout chez l’homme de plus de 35 ans et la femme de plus de 45. Il faut éviter de faire une activité physique sportive quand il fait plus de 35°. Le sportif doit faire un échauffement avant de pratiquer son sport et une récupération de 10 à 15 minutes pour préparer son cœur. Un sportif qui a de la fièvre ou une grippe ne doit pas faire de sport dans les huit jours qui suivent sa maladie. Il doit se reposer pendant 10 jours au moins. Il faut qu’il soit habitué à boire de l’eau même s’il n’a pas soif, trois à quatre gorgées toutes les 30 minutes lorsqu’il est sur le terrain. Un sportif ne doit pas fumer. Et la dernière règle c’est d’éviter l’automédication et les substances dopantes.

Quels doivent être les premiers réflexes face à une victime de malaise cardiaque ?

La survie de la victime dépend du temps de prise en charge. Dès qu’on voit une personne qui tombe avec une absence de conscience, de mouvements respiratoires et de pouls carotidiens, il faut appeler les secours et, en attendant commencer un massage cardiaque par série de 30 en faisant successivement deux bouches à bouches. Il faut également utiliser un défibrillateur pour faire un choc électrique. Ça doit être bien organisé. 

Mais est-ce que ces défibrillateurs sont à la portée de tous ?

C’est vrai qu’il y a un déficit. Mais ils doivent être partout, dans les rues, dans les hôtels, les aéroports, dans tous les lieux publics. Et il faudrait former les populations à l’utilisation du défibrillateur. Parce que, plus l’arrêt cardiaque dure, moins on a de chance de survie.

jeudi 9 mai 2019

Rejet du voile : ignorance ou mauvaise foi ?

Une femme voilée
Depuis quelques jours « un bout de tissu » occupe toutes les discussions, le voile. Tout est parti de l’interdiction du port du voile annoncée par l’Institution Sainte Jeanne d’Arc (ISJA) à travers un communiqué envoyé mercredi passé aux parents d’élèves. Une décision qui a suscité diverses réactions dont la majorité la juge inconstitutionnelle et illégitime. Le même jour (mercredi 1er mai 2019), après la proclamation des résultats de la 7ème édition du concours Reine des Grandes Ecoles, une des candidates (Ndéye Marie Aida Ndiéguéne) a dénoncé une discrimination qu’elle aurait subie à cause de son voile. Ces deux cas ont apparemment levé le voile sur la perception que certains ont de ce « bout de tissu ». Est-ce de la méconnaissance ? Est-ce un rejet de mauvaise foi ? On saurait y répondre. Nous allons, de fil en aiguille, découvrir l’essence du voile et comment il est perçu par les religions révélées et par les sociétés contemporaines.




Le voile islamique : « réflexions sur un rejet »

Déjà en 2018, un sondage mené par le magazine Marianne le Mag révèle qu’une écrasante majorité des Français ont rejeté le port du voile. Au total, 79% considèrent le voile islamique comme étant « contraire aux valeurs civiques françaises ». D’ailleurs, Emmanuel Macron est du même avis. Interrogé sur le port du voile, il a déclaré lors d’une interview télévisée que c’est « l’opposé des valeurs civiques françaises ». Venant des Français, une telle attitude pourrait être compréhensible compte tenu de leur culture et de leurs réalités socioreligieuses. Ça n’a rien d’extraordinaire alors. Toutefois percevoir la même réaction au Sénégal est juste étrange.



Dans un pays où 94% de la population auraient l’islam comme religion, le port du voile ne devrait pas être un hic. Hélas tel n’est pas le cas. Une enquête menée par le site AllAfrica.com montre que : « les femmes sénégalaises voilées ont du mal à trouver du travail dans les institutions bancaires ». Le constat est que la société sénégalaise semble plus accepter le port du voile en tant qu’effet de mode que celui suscité par une envie de se conformer à la loi islamique. Le voile n’est pas vu comme une obligation religieuse mais plutôt comme relevant du domaine esthétique. Penda Mbow, dans son article intitulé l’islam et la femme sénégalaise, développe la même idée et insiste sur le fait qu’islamisation ne signifie pas arabisation. De prime abord, on pourrait donner du crédit à sa réflexion, d’autant plus que dans un passé récent, le voile n’était pas aussi répandu qu’aujourd’hui, c’était juste l’affaire des femmes âgées. Mais la réalité est autre. Le voile n’est en aucun  cas de l’apanage de la culture arabe. Elle a toujours été une prescription dans les religions qui ont précédé l’islam.

Que disent les textes fondateurs des religions ?


La pudeur a toujours été au centre de toutes les religions dont l’islam est leur parachèvement. Dans la bible, deux livres reviennent essentiellement sur le port du voile. La Genèse et le Cantique des Cantiques mentionnent le voile des femmes. Ainsi, voyant Isaac, Rébecca se couvre la tête de son voile et le fiancé du Cantique des Cantiques affirme : « Tes yeux sont des colombes à travers ton voile » (Ct 4, 1). Et dans la Genèse, la même scène y est relatée, «Elle dit au serviteur : « Qui est cet homme qui vient dans les champs à notre rencontre ? » Le serviteur répondit : « C’est mon maître. » Et elle (Rébecca) prit son voile et se couvrit. La tradition rabbinique a cependant établi un code de «modestie» qui impose aux femmes mariées le port d’un couvre-chef en dehors du foyer conjugal. Aujourd’hui, certaines se contentent de se couvrir à la synagogue. D’autres mettent un foulard (tichel) lors qu'elles sont en compagnie. La majorité des femmes juives orthodoxes portent une perruque (sheitel). Dans les communautés libérales, par contre, elles choisissent parfois de s’abstenir de tout couvre-chef.
Dans la Palestine du temps de Jésus, les femmes mariées portaient le voile. Dans la première lettre aux Corinthiens, Saint Paul fait de cette coutume un signe de respect religieux : « Si une femme ne se voile pas la tête, qu’elle se coupe aussi les cheveux. Or, s’il est honteux à une femme d’avoir les cheveux coupés ou la tête rasée, qu’elle se voile. » (1 Corinthiens 11). Tertullien, évêque de Carthage au IIIe siècle, est allé plus loin : « Une jeune fille sans voile n’est plus vierge », écrit-il. Pour les protéger, l’Église primitive a demandé aux femmes vierges, ancêtres des religieuses, de porter le voile, signe à l’époque romaine de la femme mariée. Le christianisme a prolongé cette tradition avec la prise de voile des religieuses. Le voile est alors un symbole d’union à Dieu dans la chasteté. 

Dans le Coran, plusieurs versets, difficiles à traduire et à interpréter, prescrivent aux femmes de porter le voile par pudeur, pour se distinguer des autres femmes et se protéger des regards indélicats. « Ô Prophète, dis à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants de se couvrir de leurs voiles : c’est pour elles le meilleur moyen de se faire connaître et de ne pas être offensées… » (Sourate 33, v. 59). Le terme employé – jilbâb, au pluriel jilâbîb – désigne l’ample tunique que les femmes arabes portaient alors de façon non systématique. Un autre verset prescrit : « Dis aux croyantes de baisser leurs regards, d’être chastes, de ne montrer que l’extérieur de leurs atours, de rabattre leurs voiles sur leurs poitrines !» (24, 31). Il est précédé d’un verset qui exhorte les hommes à la chasteté. 

Le mauvais procès fait au voile

Le rejet du port du voile peut s’expliquer parfois par les nombreux clichés qu’en font certains avec des arguments bidons. Soit on évoque la laïcité qui d’ailleurs ne signifie pas une négation des pratiques cultuelles des uns ou des autres mais plutôt une assurance que l’Etat ne privilégiera aucune religion par rapport à une autre et qu’il garantira la liberté de culte. Soit on évoque une certaine soumission des femmes voilées qui se voient obliger de mettre le voile. Une idée impertinente.

Une enquête menée par Express et l’Institut Montaigne auprès des Français musulmans montre que 76% des musulmanes voilées disaient porter le voile « par obligation religieuse » et juste 6% disent être contraintes. Ainsi, il y a une généralisation de certains cas de femmes forcées à le porter et qu’on a présenté comme des exceptions celles qui l’ont choisi, alors que c’est l’inverse : la plupart des femmes le porte de leur plein gré. Le voile n’est ni innocent, ni mode anodine, ni cache pour les cheveux, il porte en bannière l’identité d’une religion qui ne demande qu’à être respectée.  



vendredi 3 mai 2019

Les médias, vecteurs de paix sociale

De gauche à droite:
Mouminy Camara (Modérateur)
Commandant Ndiaye (chef de la communication de la gendarmerie)
Innocence Ntap (Présidente du HCDS)
Badara Sakho (Représentant du Médiateur de la République)
Seydi Gassama (Amnesty International)
Le Centre d’études des sciences et techniques de l’information a tenu cet après-midi un panel dans le cadre de la journée mondiale de la liberté de la presse. Au-delà du thème générique retenu cette année, les panélistes ont fixé le regard sur les médias en tant que vecteurs de paix sociale.

Dès l’entame de la cérémonie, Innocence Ntap Ndiaye, présidente du Haut Conseil du Dialogue Social (HCDS), a tenu à revenir sur l’essence du dialogue social. Elle considère ce dernier comme  toute forme de conversation entre trois acteurs : les gouvernants, les employeurs et les employés. Selon l’ancienne ministre, la presse a certes son rôle à jouer, mais elle doit aussi mieux connaître le milieu du travail pour savoir comment traiter les informations sans troubler la stabilité du secteur. Le représentant du médiateur de la République, M. Badara Sakho a tenu à rappeler que les médias doivent mesurer le poids de leurs responsabilités en rappelant le feu allumé par la radio Colline lors du génocide rwandais.

Dans son intervention, Seydi Gassama d’Amnesty International a changé de registre. Il est revenu sur les difficultés que les journalistes sénégalais rencontrent dans la pratique de leur métier, allant même jusqu’à subir des incarcérations. Il a tout de même appelé les journalistes à faire preuve de professionnalisme qui ne peut s’acquérir que par le biais d’une bonne formation. D’ailleurs le chef de la division  communication de la gendarmerie a emboité le même pas. Le commandant Ndiaye à appeler les journalistes à tenir en compte des réalités liées aux forces de sécurité. En tant que « la grande muette », les forces de sécurité sont certes appelées à collaborer avec les médias, mais ne peuvent pas tout dévoiler dans l’espace public. « On est obligé d’intégrer la presse, sinon elle va interpréter à sa manière » dit-il.

mardi 30 avril 2019

Diploweb: Synthèse de l'actualité internationale d'avril 2019




Voici une synthèse de l’actualité internationale d’avril 2019 qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique, voire préparent les oraux d’un concours.


Le sort des urnes

En Slovaquie, la libérale Zuzana Caputova devient en avril 2019 la première femme à occuper la magistrature suprême. Elle a fait de la lutte contre la corruption l’un de ses principaux chevaux de bataille. 


En Ukraine, est élu en avril 2019 à la présidence Volodymir Zelensky (avec près de 73 % des suffrages exprimés) qui n’a pas davantage d’expérience politique que la nouvelle présidente slovaque, mais est issu, lui, du monde du spectacle. Il s’est imposé face au président sortant (Petro Porochenko) et l’égérie de la révolution orange, Ioulia Timochenko, ancienne premier ministre. C‘est révélateur de l’étendue du discrédit de la classe politique ukrainienne incapable de faire face aux défis géopolitiques du pays (annexion de la Crimée, guerre de basse intensité dans le Donbass…) et de résister à une corruption qui gangrène le pays. 


En Israël, Benjamin Netanyahu est reconduit en avril 2019, à la suite des élections législatives, dans ses fonctions de premier ministre. Il forme une nouvelle coalition.


En Indonésie, Joko Widodo, président sortant, est réélu. Son challenger le général Prabowo Subianto conteste les résultats de l’élection présidentielle. 


Le Japon s’apprête à une transition impériale. Fait extraordinaire, l’empereur Akihito – fils d’Hirohito l’empereur de la Seconde Guerre mondiale – annonce son désir d’abdiquer pour des raisons de santé. Il laisse le trône à son fils Naruhito, âgé de 58 ans, avec qui se prolonge la plus ancienne dynastie du monde. La date est fixée au 30 avril qui voit la fin de l’ère Heisei et le début de l’ère Reiwa placée sous le signe de la bonne fortune -Rei – et de l’harmonie – wa- dans un pays qui reste très attaché à l’empereur qui incarne l’âme japonaise et la cohésion de la nation. 

Toujours la violence

Le Sri Lanka a été ensanglanté en avril 2019 par un terrible attentat, revendiqué par l’EI qui a fait plus de deux cents cinquante morts et plus de blessés encore. Le Sri Lanka n’a pas encore fini de panser ses plaies de la longue guerre civile (1983-2009) qui a opposé les cingalais bouddhistes (majoritaires sur l’ile) et les Tigres tamouls hindous. Elle a fait plus de cent mille morts et a été à l’origine de l’assassinat du premier ministre indien Rajiv Gandhi, fils d’Indira. Beaucoup craignent que la fragile paix civile ne vole en éclat. Si les ressorts ne sont pas les mêmes, cette ile n’en demeure pas moins encore habitée par la violence. Les autorités srilankaises estiment qu’un mouvement autochtone - le NTJ – en serait responsable. Ces attentats qui ont ciblé les catholiques de l’ile, où ils sont minoritaires (environ 7% des srilankais), ont été perpétré par des kamikazes musulmans qui représentent moins de 10% de la population et plutôt issus des couches aisées. Ces tristes événements mettent en lumière les progrès de l’islam radical parmi les travailleurs srilankais émigrés en Arabie saoudite qui reviennent chez eux avec une lecture et une pratique de l’islam influencée par le wahhabisme. 


Au Burkina Faso, comme dans le Mali voisin, les djihadistes s’en prennent aux élites coutumières, chef du village, marabout, qui leur résistent attisant en retour des violences intracommunautaires entre les éleveurs nomades peuls accusés de soutenir les terroristes au Sahel et les cultivateurs, Mossis ou autre, déstructurant ainsi les communautés et semant le chaos. La situation se dégrade malgré l’opération Barkhane et le G5 Sahel qui peine à se déployer.


Boko Haram a encore tué en avril 2019 une dizaine de personnes. 


En Irlande, une nouvelle flambée de violence a provoqué la mort d’une journaliste à Derry (Irlande du Nord). Cela ravive le spectre de la guerre civile irlandaise quand certains courants radicaux ont fusionnés au sein de la NIRA (Nouvelle IRA).

Des cartes rebattues en Afrique ?

En Algérie, les manifestations de rue continuent en avril 2019. S’il parait acquis que le président en exercice ne briguera pas de nouveau mandat, l’avenir n’en demeure pas moins incertain et la possibilité de la confiscation de cette « révolution politique » par une révolution de palais n’est absolument pas à exclure. L’armée se montre plus présente quelle ne l’était il y a quelques semaines. Le Parlement nomme le président du Sénat, Abdelkader Bensalah en tant que président par intérim, en attendant la tenue d’élections.


En Libye, le maréchal Haftar, homme fort de la Cyrénaïque où il a vaincu les djihadistes, marche en avril 2019 avec des troupes armées – l’ALN - vers la capitale Tripoli où siège le pouvoir – le gouvernement d’union nationale (GNA) d’al-Sarraj - soutenu par la communauté internationale, et en particulier l’Italie, la Turquie et le Qatar. Son offensive a été stoppée par les forces progouvernementales. Le maréchal Haftar est discrètement soutenu par la France, la Russie, l’Égypte, l’Arabie saoudite ou les Émirats arabes unis. La Libye est plus que jamais fragmentée et soumise à la loi de bandes armées, djihadistes ou loyalistes. La laborieuse offensive du maréchal Haftar ne fait que complexifier la donne sans assurance d’imposer une forme de stabilité, et les pays européens – Italie en tête – redoutent une nouvelle vague migratoire de plusieurs centaines milliers de personnes.


Au Soudan, un coup d’État écarte en avril 2019 du pouvoir le président Omar el Béchir, à la tête de son pays depuis trente années. Il était lui-même parvenu au pouvoir grâce à un coup d’État soutenu par les islamistes. L’armée annonce installer un Conseil militaire de transition, mais la population qui manifeste contre El Béchir depuis plusieurs mois ne se laissera peut-être pas aussi facilement confisquer le pouvoir. Omar el-Béchir a été arrêté et mis en résidence surveillée, l’état d’urgence est décrété pour trois mois. Abdel Fattah Al Burhane est le nouveau visage de Khartoum. Ces événements ne sont pas sans rappeler ceux de l’Algérie. 


En Égypte, le maréchal Al Sissi bénéficie en avril 2019 d’une réforme constitutionnelle qui élargit ses pouvoirs et allonge son mandat à six ans ce qui lui permet de se maintenir au pouvoir jusque 2024.

L’Union européenne face à ses défis

La corruption est aussi – et encore - un mal européen. En avril 2019, elle est au cœur des élections en Slovaquie, et continue de défrayer la chronique politique en Roumanie où Laura Codruta Kövesi, ancienne procureur anticorruption, pressentie pour prendre la tête du parquet européen, est accusée de corruption passive par un pouvoir qui l’exècre. En Bulgarie, le ministre de l’Économie est mis en examen pour le détournement de fonds européens – environ 200 000 euros – mais l’enquête menée porte sur un détournement de plusieurs dizaines de millions d’euros. Le Conseil de l’Europe presse Malte de faire des efforts soutenus en la matière, rappelons-nous que la journaliste Caruana Galizia a payé de sa vie ses investigations concernant la corruption à un niveau élevé de l’État. 


Le Brexit n’a pas eu lieu à la date butoir initiale du 29 mars 2019. Il est repoussé, et ne sera probablement pas effectif avant les élections européennes qui doivent se tenir à la fin du mois de mai 2019, malgré l’opposition de la France. Les Britanniques participeront-ils aux élections pour élire des députés qui n’auront peut-être pas réellement le temps de siéger au sein de la nouvelle assemblée ? Ou qui utiliseront leur élection pour contribuer à des dysfonctionnements de l’UE ? 

L’OTAN fête en avril 2019 ses 70 ans. Cette alliance militaire créée en pleine Guerre froide, au lendemain du blocus de Berlin, lui a étrangement survécu tout en s’élargissant aux anciennes démocraties populaires d’Europe centrale et orientale qui y ont adhéré avant même d’entrer dans l’Union européenne. L’OTAN couple les deux rives de l’Atlantique Nord, ce qui en fait une alliance essentiellement occidentale… sous la domination des États-Unis. Cette alliance multilatérale est aujourd’hui en plein doute. Washington demande à ses alliés européens de faire un réel effort financier, que très peu sont prêts à réaliser, pour que leurs dépenses militaires atteignent 2% de leur PIB. La Turquie, membre de l’OTAN, vient de se porter acquéreur d’un système russe antimissiles S-400, or il est de bon ton que les membres de l’OTAN achètent du matériel militaire auprès de leur allié américain qui fournit l’essentiel des subsides de l’Alliance de l’Atlantique Nord….


L’attitude de l’Union européenne vis-à-vis de la Chine est ambivalente, à la mesure de la division des membres de l’Union. Au moment où les différents commerciaux avec les États-Unis pèsent sur l’économie chinoise, où éclate l’affaire de suspicion d’espionnage industriel par Huawei et la négociation des marchés de la 5G, les rapports se tendent entre Européens et Chinois. Les premiers commencent à évoquer le bienfondé de la réciprocité commerciale, et Emmanuel Marcon invite en avril 2019 Angela Merkel et Jean-Claude Juncker quand il reçoit le président chinois Xi Jinping. Ce front uni européen ne doit pas faire illusion car Pékin sait jouer des divisions européennes et la Chine est devenue un partenaire et un investisseur de premier plan en Europe centrale, orientale, balkanique et de plus en plus méditerranéenne. 

Les États-Unis sur tous les fronts

Les États-Unis de Donald Trump durcissent en avril 2019 leur bras de fer commercial avec l’Union européenne. Washington taxerait des produits européens (hélicoptères, avions, produits agricoles…en sus des taxes qui frappent l’acier et l’aluminium européen) pour environ onze milliards de dollars mesure de rétorsion en réponse aux subventions qu’aurait touché Airbus au détriment de l’avionneur américain Boeing. Une annonce qui passe mal de ce côté de l’Atlantique. 


Le président américain décide aussi en avril 2019 d’étrangler davantage l’économie iranienne. Washington ne prolonge pas les dérogations accordées aux principaux acheteurs du brut iranien, assurant que d’autres producteurs de pétrole - dont les Etats-Unis et certaines pétromonarchies du Golfe – augmenteraient leur production. Cette politique, comme les sanctions pesant sur le Venezuela de N. Maduro, provoquent une flambée du cours du pétrole. La spéculation bat son plein, cela remplit les caisses des exportateurs de pétrole et rend les huiles de schiste plus rentables. Cette politique (re)pose aussi de nouveau la légitimité de l’extraterritorialité du droit américain.


Un proche de Donald Trump, David Malpass, remplace en avril 2019 à la tête de la Banque mondiale – une des instances financières internationales créée à Bretton Woods en 1944 avec le Fonds Monétaire International - pour remplacer l’ancien président démissionnaire, lui aussi américain. Les présidents américains ont généralement soin de faire élire à la présidence de cette institution une personnalité qui partage leurs vues. Donald Trump s’inscrit, ici, dans la continuité de ces prédécesseurs. 


Les États-Unis demandent l’extradition de Julian Assange – qui a créé WikLeaks qui révèle des secrets d’État – qui vient d’être arrêté en avril 2019 à l’ambassade de l’Équateur à Londres où il avait trouvé refuge il y a sept années. L’Équateur de Lenin Moreno considérait Julian Assange comme un hôte bien encombrant, et ce faisant Quito se rapproche de Washington qui pourrait lui accorder des facilités financières. 

La Russie de nouveau au centre du jeu ?

C‘est l’impression que donne la Russie de Vladimir Poutine. Benjamin Netanyahu y recherche un adoubement international pour créditer sa candidature aux législatives. Le leader nord-coréen Kim Jong-Un se rend en avril 2019 à Vladivostok pour y rencontrer le président russe après avoir rencontré le président américain au Vietnam. Le président russe se rend à Pékin pour participer au deuxième forum des nouvelles routes de la soie qui traversent le territoire russe. Vladimir Poutine dépêche des navires au Venezuela pour assister le régime chaviste aux abois. Il accorde, au lendemain des élections présidentielles ukrainiennes, la nationalité russe à ceux qui le souhaitent et qui vivent dans la partie orientale de l’Ukraine, les régions de Donetsk et Lougansk. La Russie se positionne comme acteur important de la scène géopolitique internationale. Son obsession est de se trouver à la table des décideurs, même si les fondamentaux de sa puissance sont fragiles (démographie, économie rentière…). 


Le monde connait une nouvelle épidémie de rougeole, plus de 170 pays serait concernés d’après les chiffres livrés par l’OMS qui recense en avril 2019 plus de 112 000 cas, soit une augmentation de 300% sur le premier trimestre de l’année 2019. Comment expliquer cette situation ? La première raison réside dans la mobilité croissante des populations qui, en contact avec des populations contaminées, reviennent chez elles et transmettent à leur tour la rougeole, connue pour être très contagieuse. La seconde raison est le reflux des l’acceptation des vaccins. Ainsi, à New York dans un quartier de Brooklyn s’est déclenché une épidémie de rougeole au retour d’Israël – où sévit une épidémie - de membres de la communauté juive orthodoxe qui refuse la vaccination… 

La Chine au centre des critiques ?

Alors que l’endettement chinois, public et privé, s’envole, Pékin accueille en avril 2019 le deuxième sommet des nouvelles routes de la soie qui doivent relier – voire unir – l’Asie à l’Europe et l’Afrique ; l’Italie est le premier pays du G7 à rejoindre ce projet. Ces voies terrestres et maritimes nécessitent de lourds investissements en infrastructures et conduisent certains pays qui les accueillent à s’endetter au-delà du raisonnable, comme le Sri Lanka qui s’est retrouvé dans l’impossibilité de faire face à ses traites et contraint d’accepter les conditions chinoises : céder pour 99 ans le port d’Hambantota.


Vient d’être rendu en avril 2019 le jugement concernant les « parapluie de Hong Kong » (contestation à caractère démocratique) dont les protagonistes ont été condamnés à des peines de prison ferme. Cela confirme le resserrement de l’étreinte de Pékin sur Hong Kong dont les acquis démocratiques sont clairement menacés. 

Départ

En avril 2019, la cinéaste française Agnès Varda s’en est allée rejoindre son compagnon Jacques Demy. Nous devons à cette cinéaste atypique des films comme Les glaneuses ou Jacquot de Nantes. Sa vie comme son œuvre sont aussi marquées un engagement féministe militant.
Bonnes nouvelles

Les appartements de la reine du château de Versailles seront de nouveau ouverts aux visiteurs après une rénovation qui a duré trois années.


La première photographie d’un trou noir a été rendue publique en avril 2019. Il s’agit de celle d’un trou noir de la galaxie Messier 87 à une cinquantaine d’années-lumière de notre Terre. 


La générosité s’exprime à l’occasion du dramatique incendie qui a ravagé en avril 2019 la cathédrale Notre-Dame de Paris. Un incendie qui emporte la toiture de la cathédrale où sont célébrés de grands événements du pays, et la flèche rajoutée par Viollet-le-Duc. Un incendie qui émeut au plus profond d’eux-mêmes nombre de Français. Une générosité de Français, qu’ils soient fortunés ou non, mais aussi internationale (depuis les États-Unis, la Serbie…) du fait de simples particuliers comme d’acteurs publics et plus largement l’émotion mondiale montrent que la France n’est pas un pays comme les autres, et que son patrimoine appartient au patrimoine de l’humanité. Les modalités et la temporalité de la reconstruction restent à définir.

samedi 20 avril 2019

Classement Liberté de la presse 2019: Le Sénégal gagne une place

De gauche à droite:
Pape Séne (journaliste gambien)
Fatou Diagne Senghor (Présidente Article 19)
Assane Diagne (Dr du bureau de l'Afrique de l'ouest de RSF)
Arnaud Froger (Représentant RSF en Afrique)

Reporters Sans Frontières (RSF) a tenu une conférence de presse ce jeudi 18 avril au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (CESTI). A l’ordre du jour, la publication du classement mondial de la liberté de la presse 2019.





Pour la première fois, Reporters Sans Frontières a décidé de choisir l’Afrique subsaharienne pour la publication du classement mondial de la liberté de la presse édition 2019. Ce rapport montre d’emblée que « la haine des médias dégénère en violence, laquelle est facteur de la montée de la peur ».

Comme d’habitude, la Norvège conserve pour la troisième année consécutive sa place de premier, tandis que la Finlande retrouve sa deuxième position, au détriment des Pays-Bas, où deux reporters spécialistes du crime organisé sont contraints de vivre sous protection policière permanente. Dans la corne de l’Afrique, l’Erythrée atteint l’antépénultième place, malgré la pacification de ses relations avec l’Ethiopie, tandis que le Turkménistan est désormais dernier, à la place de la Corée du Nord.

Le Sénégal sort 49ème de la liste (50ème en 2018) sur un ensemble de 180 pays et territoires. Selon le responsable de RSF en Afrique, le Sénégal pouvait mieux se placer mais le seul hic reste la dépénalisation du délit de presse. Au titre des bonnes nouvelles sur le continent africain, l’Ethiopie  et la Gambie gagnent respectivement 40 et 30 places, une progression significative.

dimanche 31 mars 2019

Qui est Sibeth Ndiaye, la nouvelle porte-parole du gouvernement français?

Sibeth NDIAYE


Dans la campagne d'Emmanuel Macron, une femme a joué un rôle clef: Sibeth Ndiaye, sa conseillère presse et communication. Portrait de celle qui est toujours aux côtés du nouveau président de la République.


Dans le documentaire Les Coulisses d'une victoire, sur les 200 jours d'Emmanuel Macron jusqu'à sa victoire à la présidentielle, elle est omniprésente. On la voit recadrer un journaliste à cause d'un titre malencontreux, apostropher un autre lors d'une conférence de presse, évoquer son coiffeur à propos des rumeurs sur le candidat d'En Marche!


Incontournable et indispensable au candidat victorieux qu'elle accompagne partout, Sibeth Ndiaye fait partie du premier cercle d'Emmanuel Macron. Leur collaboration a débuté à Bercy lorsqu'il est devenu ministre de l'Economie. Elle était alors au service de presse de son prédécesseur Arnaud Montebourg après avoir travaillé avec Claude Bartolone au conseil général de Seine-Saint-Denis.


Diplômée d'un DESS d'économie de la santé, ancienne de l'Unef, le syndicat étudiant , adhérente au PS depuis 2002, Sibeth Ndiaye est née au Sénégal et a été naturalisée française en 2016. Une partie de sa famille vit encore au Sénégal, mais aussi au Togo et en Côte d'Ivoire.


A 37 ans, cette maman de trois enfants a été une des chevilles ouvrières de la campagne du candidat d'En Marche. En Diola, Sibeth signifie "qui a remporté beaucoup de combats". Elle est certainement prête à en livrer encore d'autres aux côtés d'Emmanuel Macron.

vendredi 29 mars 2019

Dakar est malade !

La capitale sénégalaise souffre et s’étouffe. Toutes ses artères sont infectées. L’anarchie notée au sein de l’espace public est devenue épidémique et se propage de jour en jour. 

Gare routière de Petersen à Dakar




Le constat est unanime. L’occupation anarchique de l’espace public est un fait. Le quartier de « Difoncé » situé vers Dakar Plateau en est une parfaite illustration. Une colonne de cars rapides garés le long de la route, des tabliers occupant les trottoirs et les piétons circulant dangereusement sur la chaussée côte à côte avec les véhicules, tel est le décor de cette rue tant fréquentée. Assis sur un banc, non loin des bus tata, les yeux rouges, une bouteille de jus de bissap à la main, Issakha se désole de cette situation. « Le stationnement anarchique des voitures sur les trottoirs est juste insensé. Je ne comprends pas pourquoi les autorités ne prennent pas leurs responsabilités pour les déguerpir » dénonce-t-il. Le pire reste les conséquences sanitaires qu’engendre cette anarchie. Si on se tient aux propos de nos interlocuteurs, la fumée dégagée par les voitures pollue l’air et la plupart de ceux qui fréquentent les lieux souffrent de maladies pulmonaires. « Chaque jour, à ma descente, je suis obligée de boire du lait, sinon je ne pourrais pas dormir tranquillement » nous confie une vendeuse de fruits. Pour pallier ce problème, les autorités municipales ont déployé sur le terrain des agents chargés de mettre des sabots de Denver sur les roues des voitures males stationnées et de faire payer des amendes à leurs propriétaires. Toutefois, cette mesure manque d’efficacité car ne pouvant pas atteindre toutes les artères de la ville. Interrogée sur le sujet, la mairie de Médina a allégué un « manque de moyens » notoire qui freine leurs politiques de déguerpissement des occupants de la voie publique. Selon Mme Doucouré, conseillère municipale, « L’acte 3 de la décentralisation en est la cause ». La situation ne tombe pas du ciel. La principale raison reste la croissance de la population dakaroise qui entraîne une augmentation du parc automobile. Selon l’Agence National de la Statistique et de la Démographie (ANSD) Dakar comptent près de 375.000 voitures, c’est-à-dire 2 sur 3 au niveau national. 
Marché HLM 
L’avenue Cheikh Anta Diop présente le même désordre. La devanture de l’Université (en face de la Brioche dorée) est occupée par des marchands qui en ont fait un mini marché. Ici les passants partagent la chaussée avec les véhicules faute de trottoirs qui sont occupés par les commerçants. Du coup, les automobilistes se voient obliger, à chaque fois, de freiner pour permettre aux piétons de traverser la route. C’est d’ailleurs ce qui est à l’origine des multiples embouteillages notés sur cet axe, surtout aux heures de la descente. Interviewé sur la question, un étudiant nous met dans une autre piste en nous signalant le cas des cérémonies religieuses qui s’organisent au sein du campus social de l’université et qu’il considère comme étant de l’anarchie. C’est aux environs de 12h que nous nous sommes rendus vers le pavillon A de l’université pour la constater. Déjà à cent mètres, nous percevions des chants religieux qui résonnent dans les alentours. Les sonorités s’amplifient au fur et à mesure que nous nous approchions du pavillon. Arrivé au premier étage, on aperçoit un cercle de jeunes vêtus de grands boubous, les têtes baissées sur des livres avec des écritures arabes. La main collée à l’oreille, un d’entre eux dirige le chœur en haute voix. Tout le bâtiment résonnait ainsi aux rythmes de ces incantations. Les autres faisaient des va et vient sans jeter un regard particulier au groupe, comme s’ils étaient habitués à cette scène. Interrogé sur le sujet, un des fidèles justifie leur acte par une nécessité de « manifester leur croyance et de vivre leur religion au quotidien ». Toutefois, le bonheur des uns semble faire le malheur des autres. Rencontré au rez-de-chaussée, John, vêtu d’une culotte et d’un débardeur avec un air renfrogné, nous confie son désaccord par rapport à ces cérémonies religieuses organisées au sein des pavillons. «J’étais en train de dormir comme ça et ils m’ont réveillé. C’est vrai que c’est leur religion, mais ils doivent quand même prendre en compte le milieu dans lequel nous sommes »  se désole-t-il. Dans ce milieu universitaire, il est noté un certain laisser-aller favorisant une banalisation des cas d’occupation anarchique de l’espace.

Pourtant des règles ont été édictées pour réguler l’occupation de l’espace public en général. C’est à l’exemple de la loi 74-13 du 24 juin 1974 qui régit les manifestations sur la voie publique et la loi 78-02 du 29 janvier 1978 relative aux réunions publiques. Ces deux lois garantissent la protection de l’ordre public et le respect des libertés publiques.

Aux termes des dispositions de l’article 96 du code pénal, les réunions sur la voie publique sont interdites. Cependant, le même article prévoit que toutes les manifestations sur la voie publique doivent être soumises à une déclaration préalable 3 jours francs au moins et  15 jours au plus avant la tenue de la manifestation. Cette déclaration doit être adressée à l’autorité administrative chargée de l’ordre public. Dans cette armada réglementaire, nous pouvons noter la création du Programme National de Lutte contre les Encombrements (PNLE). Ce programme créé par la loi de Finance 2007 est rattaché au Secrétaire général du Ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat. Selon Mounirou Ly, directeur du programme, « Le PNLE a pour missions de veiller au respect des lois et règlements en matière d’occupation de l’espace public, d’élaborer et de mettre en œuvre la stratégie nationale de lutte contre les encombrements, d’appuyer les collectivités locales dans la gestion de l’espace public y compris la mise en œuvre de la police des encombrements ». Toutefois, il faut noter qu’il y a un certain laxisme noté dans l’application de ces lois et règlements pour lutter contre ce phénomène.

samedi 9 mars 2019

Les femmes au cœur des industries extractives

De la droite vers la gauche: Lika Scoot (Wim Sénégal)
Gnagna Diéne Diatta (Enda-lead)
Abdoulaye Ndiaye (Modérateur)
Moussa Mbaye Guéye (Enda-diapo)
Demba Seydi (Coalition "publiez ce que vous payez")

Le Centre d’Etudes des Sciences et Techniques de l’Information (CESTI) fête la femme ce 8 mars. Dans le cadre de la journée internationale des droits des femmes, le CESTI a organisé un panel sur le thème : « Les femmes au cœur des mines et des industries extractives : quels impacts au quotidien ? »

Elles sont aujourd’hui dans tous les terrains. Les femmes ne sont pas laissées en rade dans le milieu des industries extractives. C’est sous cet angle que les panélistes ont axé leurs interventions en s’intéressant à leurs conditions de travail, à leur accès à ce milieu et tant d’autres questions. La première intervenante, Mme Lika Scoot de Wim Sénégal, a choisi le sous-thème : « femmes dans les Mines : comprendre les enjeux et agir pour des solutions durables ». Elle a prôné d’’emblée la réalisation d’études statistiques permettant d’évoluer la présence des femmes dans le secteur. Celles-ci permettront d’identifier les problèmes que rencontrent les femmes dans ce milieu pour pouvoir y rapporter des solutions adéquates. A travers deux anecdotes, Mme Lika Scoot a aussi montré que les difficultés qu’ont les femmes de lier leur vie conjugal et leur travail dans ce secteur.

Dans le même sillage, M. Moussa Mbaye Guéye de Enda-diapo s’est intéressé aux « impacts socio-économiques de l’exploitation minière sur les droits des femmes au Sénégal ». Il laisse entendre que le respect des droits des femmes qui sont dans le secteur de l’exploitation minière commence par la promotion de  l’équité économique entre les différents acteurs. Pour M. Guéye, les entreprises elles-mêmes doivent promouvoir l’autonomisation économique des femmes mais également leur faciliter l’accès aux terres.

M. Demba Seydi de la coalition « Publiez ce que vous payez » a lui fait un plaidoyer visant à respecter la dimension genre dans le milieu des industries extractives. Il est urgent selon lui de respecter le sens cognitif de la dimension genre, en d’autres termes, respecter l’égalité et l’équité entre homme et femme. Selon lui, seulement 25% des femmes qui sont dans ce milieu ont le droit de donner leurs avis dans un niveau supérieur. Considéré comme un secteur masculin, le milieu des industries extractives est aujourd’hui pris d’assaut par la gente féminine.

jeudi 28 février 2019

Bilan de la campagne présidentielle: entre décors et records

Les 5 candidats à la présidentielle de 2019


Macky Sall, le paquet pour le second tour

Président sortant et candidat à sa propre succession, le chef de fil de la coalition Benno Bokk Yakaar a mis les bouchées doubles. Durant les 20 jours de campagne, il a sillonné la quasi-totalité du territoire national pour, certainement, défendre son bilan et proposer des perspectives qui font rêver. Pour avoir un second mandat, Macky a sorti le grand jeu avec des moyens colossaux. Son convoi est digne d’un président (africain) sortant. Selon certains quotidiens (L’AS par exemple), il aurait décaissé près de 3 milliards de FRCFA pour financer sa campagne électorale. Toute cette artillerie a assuré un « décor extraordinaire ». Quant au fond, on constate que le Président n’a pas trop privilégié l’exposé de son bilan lors de la campagne électorale. Toutes ses munitions étaient destinées à faire de nouvelles promesses et, dès fois, à lancer des piques à ses opposants. Entre danses, chants et festivités, Macky Sall n’a pas manqué de manifester toute sa confiance. On constate toutefois qu’il a réussi le pari de la mobilisation avec les nombreuses foules notées dans différents stades de football du pays.

Idrissa Seck, le retour du « Mara » dans le sérail

Il est, certainement, le plus expérimenté des candidats. Éteint par une bourde (Baka-Maka) quelques mois avant la campagne électorale, personne ne présageait son retour assez fort. Pendant ces 20 jours, Idy a misé sur la séduction et la rhétorique pour convier des foules immenses à ses meetings. Tantôt taquin, tantôt ferme, Idy n’a pas raté le président sortant en l’envoyant des piques assez salés. La caravane orange a fait le tour du Sénégal. Il faut cependant constater que l’étape de Touba a été spectaculaire. Une foule immense a mis Idrissa Seck coi, sans mot. Cette mobilisation s’est manifesté d’ailleurs sur le scrutin d’autant plus qu’il est devenu le nouveau patron de la ville religieuse.

Madické Niang, la surprise 

Résultats provisoires de la présidentielle: Macky Sall réélu avec 58,27%

Le Président Macky Sall lors de la campagne électorale

La Commission Nationale de Recensement des Votes (CNRV) a publié ce mardi 28 février 2019, les résultats provisoires de l'élection présidentielle du 24 février 2019. C'est après plusieurs heures d'attente que le juge Demba Kandji, président de la CNRV, a fini par annoncer la réélection du président sortant avec 58,27% des suffrages exprimés. Idrissa Seck crédité de 20,50% arrive deuxième devant Ousmane Sonko avec 15,67%, Issa Sall avec 4,0% et Madické Niang ferme la liste avec 1,48%.  Pour ce scrutin, le taux de participation est de 66,23% selon CNRV. 


La publication de ces résultats a suscité un tollé dans le sérail des opposants. Ces derniers ont manifesté leur désaccord par le biais d'un communiqué signé par les 4 candidats perdants. Ils ont annoncé leur refus de faire un recours devant le conseil constitutionnel habilité à annoncer les résultats définitifs. Le même jour, des tensions ont été notés dans certaines localités du pays et à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar où les étudiants sont descendus sur l'avenue pour exprimer leur courroux. 

samedi 9 février 2019

Fond d'appui à la presse: 24 journalistes formés par le CESTI

Ce samedi 9 février 2019, les stagiaires du fonds d’appui à la presse de 2016 ont reçu leurs attestations de fin de formation lors d’une cérémonie qui s’est tenue à la case foyer du Centre d’Etudes des Sciences et Techniques de l’Information (CESTI).

Photo de famille avec les récipiendaires du fonds d'appui à la presse

Ils sont au nombre de 24, hommes et femmes, qui pendant 9 mois, ont reçu les rudiments nécessaires à la bonne pratique du métier de journaliste. Tous ces récipiendaires ont été choisis dans un lot de dépositaires qui voulaient avoir le même privilège de passer par cette école d’excellence. Ils sont formés en radio, télévision et en presse écrite et ont également reçus des enseignements en web journalisme, audionumérique, montage audiovisuel entre autres.

Le représentant des stagiaires a tenu à exprimer la satisfaction de la promotion mais également à magnifier la qualité de la formation qu’ils ont reçue au CESTI avec l’aide du personnel administratif, technique et de service qui les ont mis les pieds à l’étrier.

Désormais journalistes, ils ont été invité à faire de l’éthique et de la déontologie leurs comportements de tous les jours. Le représentant du recteur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar les a exhortés à parcourir le nouveau code de la presse pour s’informer sur les droits et obligations qui les incombent.



Cette formation du fonds d’appui à la presse est aujourd’hui élargi et a pris en compte les techniciens qui, seuls, constituent la promotion de 2019 ; une manière d’élargir la formation pour atteindre tous les acteurs de la chaine selon la directrice du CESTI. Cette dernière a demandé aux autorités présentes à la cérémonie de songer à augmenter le financement du fonds d’appui à la presse pour mieux atteindre les objectifs visés par l’école.

jeudi 31 janvier 2019

Sénégal: Biographie des cinq candidats à la présidentielle de 2019

Crédit photo: emedia.sn


Au Sénégal, le conseil constitutionnel a publié, le 20 janvier 2019, la liste définitive des candidats à l’élection présidentielle de 2019. Sur 27 dossiers de parrainages déposés sur leurs tables, les 7 sages n’ont finalement retenus que 5 candidats pour l’élection du 24 février 2019. Il s’agit de : Macky SALL, Madické NIANG, El hadj Issa SALL, Ousmane SONKO et Idrissa Seck. Si les uns ont une expérience politique avérée avec un long parcours, les autres sont des novices dans le sérail politique et s’imposent de jour en jour. Nous vous proposons ainsi la biographie de chacun de ces aspirants au fauteuil présidentiel.

Macky SALL, le sortant qui veut un bis


Né le 11 décembre 1961 à Fatick, où il passa une partie de sa jeunesse avant d’aller dans le Fouta, Macky est issu d’une famille de 4 enfants. Etudiant à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, il entre dans le mouvement marxiste-léniniste And Jeuf dont il va se retirer à cause d’une divergence d’idées. Formé à l’institut des Sciences de la Terre (IST) de Dakar et diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure du Pétrole et des Moteurs (ENSPM) de l’Institut Français du Pétrole (IFP) de Paris, il devient ingénieur géologue puis géophysicien.

Macky Sall a rejoint le Parti Démocratique Sénégalais (PDS) en 1980. Après l’arrivée au pouvoir du père du sopi, Abdoulaye Wade, Macky sera nommé directeur général de la Société des pétroles du Sénégal (PETROSEN) après plusieurs années au poste de chef de la division Banque de données et conseiller spécial auprès du Président de la République, chargé de l’Energie et des Mines. De mai 2001 à novembre 2002, il devient ministre des Mines, de l’Energie et de l’Hydraulique ; de novembre 2002 à aout 2003, il devient ministre d’Etat, ministre des mines,  de l’énergie et de l’hydraulique dans le gouvernement dirigé par Mame Madior Boye ; de Aout 2003 à avril 2004, ministre d’Etat, ministre de l’intérieur et des Collectivités locales, porte-parole du gouvernement d’Idrissa Seck. Nommé premier ministre le 21 avril 2004, il est remplacé par Cheikh Hadjibou Soumaré après la présidentielle de 2007.  Il se rabat sur l’Assemblée nationale et sera élu à sa présidence le 20 juin 2007. Mais la rupture sera consommée quand il cherchera à convoquer Karim Wade, fils du président de la République, pour une audition sur les travaux de l’ANOCI. Face à son refus de démissionner de la présidence de l’Assemblée, son mandat est réduit de cinq à un an. Il se voit ensuite contraint à la démission de tous ses mandats électifs.

A la tête de la Coalition Macky 2012, il accède à la présidence le 26 février 2012 face à son ancien mentor, Abdoulaye Wade.
Aujourd’hui, il a fait un mandat de sept ans et brigue encore les suffrages des Sénégalais pour un second mandat.

Madické Niang, l’inattendu de la liste


Madické Niang est né à Saint-Louis le 25 septembre 1953. Avocat de profession, il est passé par le Lycée Charles de Gaulle de Saint-Louis avant d’entrer à la faculté de droit de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Exclu pour des faits de grèves à répétition, il part à Abidjan pour poursuivre ses études en droit. A son retour, il emprunte la voie du privé en s’inscrivant au barreau de Dakar. Fidèle compagnon de l’ancien président Abdoulaye Wade, il devient son conseiller spécial, chargé des affaires juridiques d’avril 2000 à novembre 2002. Par la suite, il occupe plusieurs postes ministériels :
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         Ministre de l’habitat de novembre 2002 à aout 2003
-      Ministre de l’énergie et des mines de septembre 2003 à mars 2007
-      Ministre des mines et de l’industrie d’avril 2007 à mars 2008
-      Ministre de la justice d’avril 2008 à octobre 2009
-      Ministre des affaires étrangères de 2009 à 2012 

Après la chute du régime de Wade en 2012, il est resté à ses côtés et a été un de ses plus fidèles compagnons. C’est quand le « pape du sopi » a décidé de placer son fils, Karim Wade, comme candidat du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) à l’élection présidentielle de 2019, qu’il a décidé d’emprunter sa propre voie en se présentant à l’élection présidentielle « pour assumer une candidature alternative du PDS ». La suite lui a donné raison car face à l’éligibilité de Wade-fils, Madické est devenu le pneu de secours de la famille libérale.  

Ousmane SONKO, la révélation portée par la jeunesse


Leader de Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef-Les Patriotes), Ousmane Sonko a fait ces dernières années une ascension fulgurante dans le cercle politique sénégalais. Il ne lui a fallu que quatre années d’existence dans le sérail de la politique sénégalaise pour s’imposer et se hisser à la tête de l’opposition.

Né le 15 juillet 1974, ce natif de Thiès a été un brillant étudiant. Major de sa promotion au concours d’entrée à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) du Sénégal, Sonko a obtenu une maîtrise en droit publique à l’Université Gaston Berger (UGB) de Saint-Louis. En 2001 il sort diplômer de l’ENA, section « Impôts et Domaines » et intègre l’administration avec un premier poste qui le conduit au Centre des services fiscaux de Pikine. En 2003, Il obtient un diplôme d’études approfondies (DEA) en finances publiques et fiscalité de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). Il est aussi titulaire d’un Master 2 en Gestion et Finances Publiques de l’Institut Supérieur des Finances (ISF) et également doctorant en droit public économique et fiscalité à l’Université Jean Moulin Lyon III. Ousmane Sonko a débuté sa carrière comme Inspecteur principal des Impôts et des Domaines. Il a été vérificateur fiscal et chef de Brigade de vérification fiscale, chargé du secteur immobilier. Il était auditeur interne à la Direction du Contrôle Interne (DCI) de la Direction Générale des Impôts et Domaines (DGID). Radié par le décret N°2016-1239 du Président Macky pour «indiscrétion professionnelle», Sonko est révélé au grand public par la presse sénégalaise.

Ousmane Sonko a réussi aujourd’hui à drainer une foule immense composée particulièrement de jeunes qui adhérent à cet esprit de patriotisme basé sur « le don de soi pour la patrie ». Le nouveau type de militant dressé par le leader de Pastef est ce citoyen qui vit pour sa patrie au détriment des partialités, c’est ce citoyen qui adhère à une vision politique bien définie et non à des rêveries vendues par certains leaders politiques. Sonko est incontestablement l’un des opposants les plus sérieux qui peuvent créer une surprise le soir du 24 février 2019.